Tentative d’épuisement d’un lieu
Nous pourrions à la façon de George Perec essayer d’épuiser notre lieu de vie.
Tentative d’épuisement d’un lieu parisien. Résumé : En octobre 1974 Georges Perec s’est installé pendant trois jours consécutifs place Saint-Sulpice à Paris. A différents moments de la journée, il a noté ce qu’il voyait : les événements ordinaires de la rue, les gens, véhicules, animaux, nuages et le passage du temps.
Tentative d’épuisement d’un lieu parisien est un récit de Georges Perec publié en 1975 dans la revue Cause commune avant d’être édité par Christian Bourgois en 1982.
Extrait :
La date : 18 octobre 1974
L’heure : 17 h. 10
Le lieu : Café de la mairie
Le kiosque à journaux était fermé ; je n’ai pas trouvé « le Monde». ; j’ai accompli un minuscule circuit ( rue des Canettes , rue du Four, rue Bonaparte ) : belles oisives envahissant des magasins de mode. R ue Bonaparte , j’ai regardé quelques titres de livres soldés, quelques devantures (mobilier ancien ou moderne, livres anciens, dessins et gravures)
Il fait froid, de plus en plus me semble-t-il
Je suis assis au Café de la Mairie , un tout petit peu en retrait par rapport à la terrasse
Passe un 86 il est vide
Passe un 70 il est plein
Passe, de nouveau, Jean-Paul Aron : il tousse
Un groupe d’enfants joue au ballon devant l’église .
Passe un 70 plutôt vide Passe un 63 presque plein
(pourquoi compter les autobus ? sans doute parce qu’ils sont reconnaissables et réguliers : ils découpent le temps, ils rythment le bruit de fond ; à la limite ils sont prévisibles.
Le reste semble aléatoire, improbable, anarchique ; les autobus passent parce qu’ils doivent passer, mais rien ne veut qu’une voiture fasse marche arrière, ou qu’un homme ait un sac marqué du grand « M » de Monoprix , ou qu’une voiture soit bleu e ou vertpomme , ou qu’un consommateur commande un café plutôt qu’un et demi)
Passe un 96 il est presque vide
Le « P » du parking et sa flèche s’allument. Dans les étages de l ‘ hôtel des finances , des globes lumineux sont maintenant visibles
Passe un 70 il est plein
Passe un 63 il l’est peu
Les motocyclettes et les vélomoteurs allument leurs phares
Les clignotants deviennent visibles et plus visibles aussi les voyants des taxis, plus brillants
quand ils sont libres
Passe un 86 presque plein
Passe un 63 presque vide
Passe un 96 plutôt plein
Passe un 87 plutôt plein
(appliquer aux autobus la théorie des vases communicants)
Il est 17 h. 50
Une bétonneuse rouge et bleu e, un Pyrénées taxis transports.
Passe un 96 il est plein
Passe un 86 il est absolument vide (seulement le chauffeur)
Passe un 63 presque vide
Passe un papa poussant poussette
Modifications de la lumière du jour
Un 87 quasi vide, un 86 à moitié plein
Les enfants jouent sous les piliers de l’église .
Un beau chien blanc taché de noir
Une lumière à un immeuble (est-ce l’ hôtel Récamier ?)
Un 96 quasi vide
Du vent
Un 63 plein, un 70 presque plein, un 63 presque plein
Un homme entre dans le café, se plante devant un consommateur qui se lève aussitôt et va pour régler sa consommation ; mais il n’a pas de petite monnaie et c’est l’autre qui paie. Ils sortent ensemble.
Un homme veut entrer dans le café ; mais il commence par tirer la porte au lieu de la pousser
Fantomatismes
Passe un 70 plein